8.10.05

Cent mille hommes, cribles d'obus et de mitraille Victor Hugo

Cent mille hommes, cribles d'obus et de mitraille,
Cent mille hommes, couches sur un champ de bataille,
Tombes pour leur pays par leur mort agrandi,
Comme on tombe a Fleurus, comme on tombe a Lodi,
Cent mille ardents soldats, heros et non victimes,
Morts dans un tourbillon d'evenements sublimes,
D'ou prend son vol la fiere et blanche Liberte,
Sont un malheur moins grand pour la societe,
Sont pour l'humanite, qui sur le vrai se fonde,
Une calamite moins haute et moins profonde,
Un coup moins lamentable et moins infortune
Qu'un innocent, - un seul innocent condamne,
-Dont le sang, ruisselant sous un infame glaive,
Fume entre les paves de la place de Greve,
Qu'un juste assassine dans la foret des lois,
Et dont l'ame a le droit d'aller dire a Dieu : Vois !

Victor Hugo

6.10.05

L'Autruche Diego Giacometti

Hurlement Munch

Je ferme les yeux Charles Baudelaire

Je ferme les yeux

Je ferme les yeux et j'ai souvenance
De tes cheveux roux flottant dans le vent,
De ta d?marche souple et provoquante,
De tes hanches qui houlaient en cadence
Les mouvements de ton corps ennivrant,
Et de toute ta personne elegante.

Je ferme les yeux et j'ai souvenir
De ton beau rire franc et saccade,
De ton regard bleute comme l'azur,
De ta bouche qui creait le desir
de te voler l'ivresse d'un baiser,
Et d'humer tes soupirs tel l'air pur.

Je ferme les yeux et vois tel un reve,
Ces moments voluptueux et trop courts,
Que nous avons vecus tous deux ensembles;
Comme douce alcove helas! trop breve,
Comme si le temps en brouillait le jour;
Je ferme les yeux et la mon coeur tremble...

Charles Baudelaire

2.10.05

Les granges Emile Verhaeren

S'elargissaient, la-bas, les granges recouvertes,
Aux murs, d'epais crepis et de blancs badigeons,
Au faite, d'un manteau de pailles et de joncs,
Ou mordaient par endroits les dents des mousses vertes.

De vieux ceps tortueux les ascendaient, alertes,
Luttant d'assauts avec les lierres sauvageons,
Et deux meules flanquaient, ainsi que deux donjons,
Les portes qui baillaient sur les champs, large-ouvertes.

Et par elles,sortait le ronron des moulins,
Rompu par les fleaux frappant l'aire a coups pleins,
Comme un pas de soldats qu'un tambour accompagne

On eut dit que le coeur de la ferme battait,
Dans ce bruit regulier qui baissait et montait,
Et le soir, comme un chant, endormait la campagne.





Emile Verhaeren

Les souliers Van Gogh

Fleur de genet

L'homme, la croise sur la lande chemin faisant
Belle allure et petit trot, chevelure d'or au vent
" Fleur de genet " c'est le nom qu'il lui donne.
Son coeur n'a fait qu'un bond, soudain il frissonne.

Deja, elle est loin, et descend vers la greve.
Lui est reste petrifie seul son regard l'a suivie.
Image de son esprit, ou fantome de ses reves ?
Son corps est lourd, et le froid l'envahit.

La mer fredonne et les goelands rient.
Son coeur saigne, pauvre poete vagabond.
N'a t'il pas devine ? Pourtant c'etait ecrit !
En pays Celte, la reine est "Fleur d'Ajonc"

Menhir qui s'en dedit !

Morine.